Pascale Favre installations

Hypertropes

La ville de Carouge se trouve à un tournant architectural et urbanistique, prenant part avec le projet Praille-Acacias-Vernets aux débats sur les questions actuelles que sont le développement galopant des villes et leurs enjeux sociaux et politiques. Notre projet s’inscrit dans ce mouvement.

Les Villes invisibles d’Italo Calvino ont servi de point de départ à notre réflexion. Villes racontées, fabulées, elles apparaissent au travers des dialogues entre Marco Polo et Kublai Kahn et font office de miroir critique de la société moderne.

« Les Villes » amènent à considérer l’homme, l’espace, l’architecture et l’urbanisme. « Invisibles » appellent visibles ; entre ces deux mots se joue la question de la représentation. Le visible est lisible et le fruit d’une représentation. Qu’en est-il de l’invisible ? Comment et pourquoi accède-t-il éventuellement à la représentation ? Enfin, la construction des « Villes invisibles » obéit à un schéma ingénieux qui rend possible une lecture non-linéaire ; la fragmentation et les diverses entrées dans le texte génèrent une multitude de points de vue. Cette idée de multiplication et de non linéarité, associée à la narration, la mémoire, et la représentation, constitue un des points d’ancrage de l’exposition. Autre point important : les villes racontées par Italo Calvino sont une intervention et leurs entêtes, qui citent « la mémoire », « le désir », « les signes », « les échanges », « le regard », ont fortement agi dans notre imaginaire et alimenté nos réflexions.

Nous avons également puisé dans un autre vivier sémantique : le réseau, qui présente l’avantage de rendre compte d’idées telles que la navigation et l’activation, l’accessibilité aux données, la mémoire et l’archivage, l’hypertexte, le développement par strates et plateaux. Quant aux tropes, définis comme des qualités particulières qui s’opposent aux universaux et se référant aux propriétés individuelles d’une chose en un certain lieu et à un certain moment, ils précisent et révèlent les mécanismes d’interprétation et d’activation de sens mis en œuvre dans cette exposition.

La Fonderie comme emplacement. Comme on stockerait des documents, l’emplacement est une mémoire vive qui met à disposition des données qui ne demandent qu’à être sollicitées, combinées et, en ce sens, fonctionne comme un hypertexte. L’hypertexte fait référence à la possibilité d’activer des liens entre diverses informations, qui se présentent en agglomérats, et permet de produire du sens par association, contiguïté et stratification.

– Texte de Thomas Schunke & Isabelle Papaloïzos, curatrice


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